Avez-vous l’intention d’acquérir un bien immobilier en passant par un crédit bancaire ? La banque exigera une garantie afin de sécuriser le remboursement de l’emprunt immobilier. La garantie de Privilège de Prêteur de Deniers est un des trois types de garanties possibles.
Celle-ci garantit à la banque qui donne le prêt immobilier qu’elle sera effectivement remboursée en priorité, si jamais le bien acquis grâce au prêt est saisi pour être vendu. Nous vous présentons, dans cet article, les caractéristiques, le montant, la durée et le fonctionnement du Privilège de Prêteur de Deniers.
Qu’est-ce que le Privilège de Prêteur de Deniers ?
Bien que les prêts immobiliers soient accordés pour une durée moyenne de vingt ans et soient remboursés généralement entre huit et dix ans lorsque les acquéreurs revendent leur bien (soldant ainsi leur crédit de manière anticipée), il ne reste que l’organisme prêteur de fonds prend malgré tout un risque en octroyant un prêt.
Il est tout à fait normal que les organismes de prêts exigent une garantie ainsi qu’une assurance emprunteur. La garantie Privilège de Prêteur de Deniers est une garantie indispensable lorsqu’un individu souhaite emprunter pour investir dans un bien immobilier.
Tout comme l’hypothèque, le Privilège de Prêteur de Deniers est une garantie « réelle » qui est prise sur le bien immobilier lui-même. Dans l’éventualité d’une défaillance de l’emprunteur quant à son remboursement, le Privilège de Prêteur de Deniers permet à la banque d’être remboursée du capital avancé, par la vente aux enchères du bien en question.
Le Privilège de Prêteur de Deniers permet de couvrir un bien immobilier qui existe déjà. Il se termine de manière automatique deux ans suivant la fin du remboursement complet du crédit immobilier souscrit. Son coût est moindre que celui de l’hypothèque.
Grâce à cette garantie, si l’emprunteur est en défaut de paiement, la banque pourra saisir le bien et le mettre en vente pour s’octroyer le capital restant dû. La loi française reconnaît deux types de créanciers : les créanciers chirographaires et les créanciers privilégiés. Les créanciers privilégiés sont ceux qui sont remboursés en priorité, alors que les créanciers chirographaires doivent se contenter de se partager le reste, si un reste subsiste.
La garantie Privilège de Prêteur de Deniers ne vaut que pour les biens immobiliers (maisons ou appartements) déjà existants. Cette garantie ne peut donc pas être souscrite dans les cas de VEFA (Vente en État Futur d’Achèvement), de construction de maison individuelle, ou pour financer des travaux.
Cependant, il est possible de l’utiliser pour garantir l’achat d’un terrain, si l’emprunteur a pour projet d’acheter un terrain et d’y construire son logement. Mais elle ne sera pas applicable pour les travaux de construction.
Son fonctionnement
Un organisme de crédit bénéficie du Privilège de Prêteur de Deniers lorsqu’il octroie un crédit immobilier à un emprunteur. S’il y a défaillance de paiement par l’acquéreur du bien, l’organisme de crédit, qui est le créancier, se verra contraint de saisir le bien et de le vendre aux enchères afin de récupérer la part du prêt restant dû par l’emprunteur.
Cela apporte l’assurance à l’organisme de crédit d’être remboursé avant les autres créanciers. Si la somme obtenue lors de la vente aux enchères permet de couvrir le reste de la dette, l’organisme de crédit va liquider la créance. Sinon, la différence reste à la charge de l’emprunteur.
L’inscription du Privilège de Prêteur de Deniers est effective dès la signature de l’acte de vente. Pour pouvoir garantir le prêt immobilier, l’organisme de crédit doit accomplir les formalités suivantes :
- Le contrat d’emprunt doit préciser que le montant de l’emprunt est effectivement destiné à l’acquisition d’un bien immobilier, ancien ou neuf
- Un notaire doit établir les actes de vente et d’emprunt
- Le contrat de vente doit indiquer que l’achat du bien immobilier a été fait grâce à un crédit. L’acte notarié de vente doit mentionner une quittance du vendeur reconnaissant que le paiement du prix a été fait grâce aux deniers empruntés.
Lorsque ces trois formalités sont remplies, l’organisme de crédit n’a pas besoin du consentement de l’emprunteur pour l’application de la garantie. Le notaire doit vérifier que le Privilège de Prêteur de Deniers soit affiché au service de publicité foncière dans un délai de 2 mois après la vente. Il est important de noter qu’il prend effet à la date de vente du bien, non à la date de l’inscription au service de publicité foncière.
Le Privilège de Prêteur de Deniers et l’hypothèque ont deux similitudes : ces deux garanties doivent être établies par un acte notarié et être inscrites au service de la publicité foncière, et en cas de non remboursement (ou si l’emprunteur devient insolvable), le bien immobilier sera saisi et vendu par voie judiciaire pour rembourser le capital restant dû.
Le coût de l’inscription
Les frais sont dégressifs. Plus le montant du crédit est élevé, plus le taux de garantie est faible. Lorsque la garantie est mise en place, le taux est souvent compris entre 0,5% et 1% du montant de l’emprunt. Le montant couvre les frais de notaire, la contribution de sécurité immobilière, les droits d’enregistrement, et la TVA (s’il s’agit d’un bien immobilier neuf dont la construction est terminée).
A noter qu’aucune taxe de publicité foncière n’est prévue. Ceci rend le Privilège de Prêteur de Deniers plus attrayant que l’hypothèque conventionnelle (qui tourne autour de 0.60% du montant de l’achat).
Le principe de la mainlevée
Lorsque l’emprunteur rembourse son crédit immobilier de manière anticipée (par exemple en vendant son bien), il doit demander la mainlevée du Privilège de Prêteur de Deniers et procéder à une désinscription du logement des services de publicité foncière. La mainlevée désigne l’acte juridique par lequel le créancier certifie que l’emprunteur a totalement remboursé son crédit.
Si cette démarche n’est pas accomplie par l’emprunteur, l’organisme de crédit pourra toujours saisir le bien en cas d’impayé. L’emprunteur doit s’acquitter de frais de « mainlevée hypothécaire” (généralement entre 1% et 2% du montant de capital restant dû). Les frais de mainlevée sont en général élevés. Mais il faut aussi se rappeler que les frais de mainlevée ne s’appliquent que lorsque la garantie est enlevée plus tôt que planifié.
Les avantages et les inconvénients de cette garantie immobilière
L’inscription en Privilège de Prêteur de Deniers offre l’avantage d’être bien moins cher que l’hypothèque, car elle n’est pas sujette à la taxe de publicité foncière. Aussi, avoir recours à ce type de garantie fait pencher la balance en faveur de l’emprunteur car elle octroie un privilège important et rassurant à l’organisme de crédit.
Un des inconvénients principaux du Privilège de Prêteur de Deniers est qu’il ne peut être utilisé pour des ventes en VEFA, pour des travaux ou pour la construction d’un logement individuel, car la garantie ne s’applique que pour des biens déjà existants.
Par ailleurs elle ne peut s’appliquer à un rachat de prêt. Les éventuels frais obligatoires de mainlevée représentent aussi un désavantage.
Le remplacement programmé du Privilège de Prêteur de Deniers
L’ordonnance 2021-1192 du 15 septembre 2021 vient supprimer les Privilèges Immobiliers Spéciaux, dont fait partie le Privilège de Prêteur de Deniers. Celui-ci sera remplacé par l’hypothèque légale spéciale du prêteur de deniers.
L’ordonnance est en vigueur depuis le 1er janvier 2022 mais une période de transition est prévue. Ainsi, les privilèges inscrits avant le 1er janvier 2022 restent valables, et les créances octroyées fin 2021 et inscrites en 2022 peuvent en bénéficier (sous réserve que le délai de 2 mois soit respecté pour l’inscription suivant la vente). En revanche, les créances octroyées en 2022 doivent être sécurisées par une autre garantie.
- L’hypothèque légale spéciale du prêteur de deniers est très similaire : elle doit être confirmée par un acte authentique, ne peut garantir que l’achat d’un bien immobilier existant, et fait l’objet d’une inscription au maximum 2 mois suivant la vente.
- Une différence majeure vient cependant entrer en jeu : l’organisme de crédit octroyant le prêt prend effet au jour d’inscription au service de publicité foncière, et non plus au jour de la création de la dette (soit, au jour de la signature du contrat). Bien que l’ordre de priorité reste très favorable à l’organisme de crédit, celui-ci ne bénéficie plus de la meilleure position possible parmi les créanciers.
- Le coût reste identique : même proportionnalité de la somme totale de l’emprunt (entre 0,5% et 1%) et couvrant les frais de notaire, les droits d’enregistrement et diverses formalités. Il n’est possible de lever une hypothèque qu’en établissant d’un nouvel acte notarié ou lorsque la dette disparaît naturellement.
Pour ce dernier cas, l’hypothèque reste inscrite encore une année mais cela n’a aucune conséquence pour l’emprunteur. Cependant, lorsque le prêt immobilier est racheté, la dette est remboursée par le nouveau créancier et l’hypothèque doit alors être effacée, ce qui va entraîner des frais de mainlevée.